samedi 6 janvier 2018

Derrière la maison de retraite.

Dessin de Doz, réalisé tout exprès pour le texte ci-dessous.

Vous pouvez retouver ses autres dessins, ainsi que beaucoup d'autres, sur:

http://fesseeo.net

DERRIÈRE LA MAISON DE RETRAITE

C’est elle qui en a parlé la première, un soir qu’on prenait le frais tous les deux, sur un banc, derrière la maison de retraite.
– Et si tu m’en donnais une là, de fessée ? Avec tous les petits vieux en face…
– S’il y a que ça pour te faire plaisir !
Et j’ai fait mine de vouloir la coucher en travers de mes genoux.
– Non, mais je plaisante, attends ! Je plaisante. Je suis quand même pas folle à ce point-là…
Elle plaisantait ? Peut-être. N’empêche que nos promenades quotidiennes se sont brusquement mises à nous ramener systématiquement à ce banc. Où elle faisait en sorte que nous nous attardions encore longtemps après la tombée de la nuit.
– Il fait si doux…
Elle fixait les fenêtres, là-haut, derrière lesquelles une ombre passait parfois, une silhouette furtive se profilait, un visage venait de temps à autre s’encadrer.
– Qu’est-ce qu’ils doivent s’embêter, quand même, là-dedans !
Des fenêtres qui s’éteignaient, les unes après les autres.
– Ça te tente, avoue !
– Non ! Oh, non ! Enfin si ! Un peu quand même. Mais j’oserai jamais de toute façon.

Et puis il y a eu ce soir-là où, plus d’une heure durant, en revenant de là-bas, elle s’est tournée et retournée dans le lit.
– Tu dors pas ?
Je dormais pas, non.
– Alors tu sais ce que je suis en train de me dire ? C’est que tu pourrais bien m’en flanquer une, finalement, une fois qu’ils sont couchés et qu’ils dorment. Personne se rendrait compte de rien.
– Et s’il y en a un qu’est insomniaque ?
– Il sera pas forcément à la fenêtre. Et puis, c’est pas sûr qu’il y en ait un.
– Mais c’est possible…
– C’est justement ça qu’est génial. De pas savoir. De se dire, après, quand c’est fini, qu’il y avait peut-être quelqu’un. Et puis peut-être pas. De pas arrêter de se demander.

Quand elle s’est enfin décidée, le surlendemain, il était pas loin de minuit.
– Ils doivent tous dormir maintenant. Mais ça va pas les réveiller au moins, le bruit ?
– Ça en fait presque pas une badine. Alors à moins que tu brailles comme un cochon qu’on égorge…
– Je serrerai les dents. Allez, vas-y !
Je ne me suis pas fait prier. J’ai relevé la jupette, descendu la culotte jusqu’à mi-cuisses et j’ai lancé les premiers coups. Espacés. Et puis d’autres, plus rapprochés, plus appuyés. Qu’elle a accompagnés, chaque fois, en rythme, d’une ruade de la jambe droite. Et d’une petite mélopée en sourdine.

Dans le lit, au retour, elle est venue se lover contre moi.
– Il y en avait qui regardaient, tu crois ?
– C’est pas que je crois. C’est que je suis sûr.
– C’est vrai ? Qui ?
– Un type, tiens ! Qui veux-tu d’autre ? Un retraité. Sur la droite. Au deuxième étage. Même qu’il avait ouvert la fenêtre pour mieux voir.
– Il a peut-être pas vu grand-chose.
– Tu parles ! Avec le lampadaire juste au-dessus… Il a dû se régaler, oui.
Elle s’est serrée plus fort contre moi.
J’ai posé une main sur ses fesses.
– Elles sont brûlantes.
L’ai glissée entre elles.
– Eh, mais c’est qu’il t’a fait de l’effet, ce spectateur inconnu, on dirait…
Elle m’a fait taire d’un baiser.
Et a, très vite, clamé un plaisir éperdu dans mes bras.

Pendant plus d’une semaine, on n’est pas retournés « là-bas ».
– Tu crois qu’il y pense encore, le type ?
– Non seulement il y pense, mais tous les soirs il est scotché à sa fenêtre, dans l’espoir que ça va recommencer…
– Le pauvre !
– Oh, toi, je sens que ça te démange de faire preuve de générosité à son égard.
– Je suis d’un naturel altruiste, tu sais bien…
– Je n’en ai jamais douté. Ce qui tombe on ne peut mieux. Parce qu’il est fort probable que, cette fois-ci, si on y retourne, il sera pas tout seul.
– Comment ça ?
– Quand on a la chance d’assister à un spectacle aussi délicieux que celui que tu lui as offert, on a très envie d’en toucher un mot aux copains. Histoire qu’ils se mettent, eux aussi, à l’affût, pour profiter de l’aubaine.
– Et puis peut-être qu’il a préféré garder ça pour lui tout seul au contraire. Jalousement…
– On peut pas savoir.
– Non. On peut pas savoir.
Elle s’est emparée de ma main et a résolument pris la direction du banc.

6 commentaires:

  1. C'est drole, un temps j'ai visité souvent une maison de retraite semblable à celle-ci, dont les fenetres donnaient sur un canal bordé d'un sentier, avec des bancs xD

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  2. Et c'est peut-être là que les choses se sont "vraiment" déroulées? ;)

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  3. Vincent flâneur7 janvier 2018 à 00:37

    J’adore !

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  4. Merci. Ravi que cette histoire vous ait plu…

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