lundi 28 février 2011

Belle-soeur, beau-frère ( 8 )





Sans lever une seule fois les yeux sur nous la serveuse a posé le petit déjeuner sur la petite table, près de la fenêtre, et s’est éclipsée aussi vite qu’elle a pu. Aussitôt la porte refermée on a éclaté de rire…
- Comment elle avait l’air gênée !…
- On n’est sûrement pas le premier couple qu’elle trouve au lit pourtant !…
- Oui, mais peut-être le premier qui fait autant de raffût… Et toute la nuit en plus !…
- Oh, faut rien exagérer !… J’ai quand même pas fait trembler les murs…
- Tu t’entendais pas !… Une vraie tigresse !…
- Ah oui ?!… Tant que ça ?!… Ben heureusement qu’on n’était pas à la maison alors !… Les voisins se seraient posé des questions…
- Au contraire !… Ils n’auraient plus eu besoin de s’en poser… Ils auraient eu toutes les réponses…
- En attendant j’ai une faim de loup, moi !… Tu voudrais pas amener le plateau là, entre nous, sur le lit ?…
Elle a mordu avidement dans un croissant…
- En tout cas j’ai eu le nez fin, moi, avec toi… Parce que c’est rare un mec avec qui tu peux tout faire comme ça… Absolument tout ce qui te passe par la tête… Tout ce dont tu crèves d’envie… Sans être obligée de te demander comment il va le prendre… Si ça va pas le choquer… Parce que tu sais souvent, vous, les types, contrairement aux apparences, vous êtes beaucoup plus coincés que nous… Et pas qu’un peu !… Faut vraiment qu’on y aille sur la pointe des pieds… Mais enfin avec toi le problème se pose pas… Et il se posera sûrement de moins en moins d’ailleurs… Bon, mais si on dormait un peu ?!… Histoire de reprendre des forces… Et de pouvoir remettre ça…

- Allo ?!… Ben alors qu’est-ce que tu faisais ?… T’en as mis un temps pour répondre !…
- Rien… Rien… J’arrivais pas à mettre la main sur mon portable…
- Tu dormais ?… T’as la voix toute ensommeillée… Tu dormais, hein ?!… Non, mais t’as vu l’heure qu’il est ?… Presque midi… T’as encore veillé la moitié de la nuit, je suis sûre… C’est bien beau de vouloir terminer ton bouquin, mais enfin y laisse pas la santé quand même !… On serait bien avancés… Tu m’écoutes ?…
- Mais oui, je t’écoute, oui…
- Et tu n’en feras qu’à ta tête… Comme d’habitude… Bon, mais en attendant nous ici, ça va… On en a abattu hier… Je peux te dire qu’on en a abattu… On a presque fini en fait… Tout sera fin prêt quand ils vont arriver… Cinquante-huit ils sont… Mais enfin ça !… Ils peuvent bien être autant qu’ils veulent… C’est pas notre problème… La logistique et l’intendance c’est eux qui s’en chargent… Nous, on se contente de mettre à leur disposition des locaux superbes, dans un cadre magnifique, et de rester à proximité, le plus discrètement possible, – on s’est gardé l’aile gauche près de l’entrée – pour le cas où il se passerait quoi que ce soit… Mais enfin je ne vois vraiment pas ce qui pourrait se passer… Des gens qui sont capables de dépenser des sommes pareilles pour se retrouver en famille ce sont forcément des gens bien… Avec lesquels il n’y aura pas le moindre souci… Bon, mais dis-moi… Est-ce que tu y es passé ?…
- Ou ça ?
- Chez Paul, pardi !…
- Ah oui !… Oui… J’y suis passé… Oui…
- Et alors ?… Tu l’as vue ?… Il va me demander, tu sais !…
- Ben oui, je l’ai vue, oui !…
- Et tout t’a paru normal ?…
- Mais oui !… Qu’est-ce que tu veux qu’il y ait d’anormal ?…
- Oui, oh ben alors là, tu sais, avec elle, on peut s’attendre à tout… Mais tu surveilles, hein !… Et si tu constates quoi que ce soit de suspect… On compte sur toi… Parce que même s’il en parle pas – il est trop fier pour ça – Paul se fait un sang d’encre… Je le connais…

- C’était Emilie…
- Ca, je m’en doutais un peu…
- Ils sont complètement dans leur truc…
- Tant mieux !… Tant mieux pour eux !… Et pour nous… Ils rentrent quand ?… Elle t’a pas dit ?…
- Non… Par contre en ce qui te concerne, toi, Paul…
- Se fait tout un film… C’est pas nouveau… Non… Là où j’ai eu tort – et j’ai pas fini de m’en mordre les doigts – c’est de lui faire mes confidences… Faut dire aussi qu’il m’avait passablement énervée ce jour-là… Jamais j’aurais dû lui avouer que j’avais besoin de sexe comme de l’air que je respire… Jamais !… Le connaissant… Encore heureux que je lui aie pas parlé du reste !… Parce que alors là !…
- Quel reste ?
- Je te dirai… En attendant faudrait bien que ça finisse par lui passer de me soupçonner comme ça sans arrêt… Parce que ça devient lourd à force… Et toi ?… Emilie ça lui est jamais venu à l’idée que tu puisses aller voir ailleurs ?… Que quand elle se tire comme ça plusieurs jours d’affilée tu puisses en profiter pour…
- Pour Emilie les choses sont très simples: elle n’a que des besoins très limités dans ce domaine et elle part du principe que tout le monde fonctionne sur le même modèle qu’elle… Moi comme les autres… C’est la norme universelle… Tous ceux qui s’en écartent ne peuvent être, à ses yeux, que d’épouvantables pervers qui relèvent de soins psychologiques intensifs… J’ai très vite compris, contrairement à toi, qu’il n’était absolument pas de mon intérêt de chercher à la détromper… Et elle est convaincue que je suis mille fois plus préoccupé par le livre que j’écris – ou que j’essaie d’écrire – que par « ça »…
- Quelle famille !… Non, mais quelle famille !… Tu peux me dire ce qu’on est allé faire là-dedans ?…
- C’est une question qu’on ferait mieux, toi comme moi, d’éviter de se poser… On risquerait de finir par trouver la réponse…

jeudi 24 février 2011

Escobarines: Sur le banc ( 4 )





- Ils diront rien… C’est pas le genre… Et puis même ce serait ma parole contre la leur… De toute façon dans huit jours ils sont repartis… Alors !… Non !… J’ai trop envie… Il est trop beau… Et son copain aussi…
- Et tu comptes t’y prendre comment ?…
- Je sais pas… J’improviserai… Je trouverai… Ca, c’est pas un problème…

- On vous ramène votre fille, M’dame…
- C’est pas ma fille !… Parce que si c’était ma fille…
- Elle habite ici, elle a dit…
- Oui… Si… Oh la la !… Mais elle est dans un état !…Qu’est-ce qui s’est passé ?…
- Il y a une petite fête par là-haut… Et elle a un peu bu…
- Un peu !?… Vous appelez ça un peu !… Elle est complètement saoule, oui !… Elle tient à peine debout… Non, mais t’as vu ça, Myriam ?…
- Je vois, oui… Ca t’étonne ?… De sa part à elle tu peux t’attendre à tout… Absolument tout… Depuis le temps que je te le répète…
- Non, mais tu n’as pas honte, toi, de te mettre dans des états pareils !?…
- Mon lit… Je veux dormir…
- Oui, ben alors ça !… Avant on a un petit compte à régler toutes les deux…
- Un compte ?… Quel compte ?… Ah oui… Comme l’autre jour… Mais ça fait mal !… Drôlement mal même… Je veux pas… Et puis ils vont voir mes fesses les deux autres, là… Je veux pas qu’ils voient mes fesses… Surtout que je les connais pas… Presque pas…
- Ils verront rien du tout… Ils ont certainement autre chose à faire qu’à attendre ici que tu aies dessaoulé… N’est-ce pas, jeunes gens ?…
- Oui… Bien sûr… On va y aller… On y va…
- Et encore merci… C’est très gentil à vous de l’avoir ramenée…

- Alors ?…
- Oh, ben alors… J’ai fait celle qui venait s’excuser de les avoir obligés à me raccompagner… Qu’était désolée… J’avais pas l’habitude de boire… Pas du tout… Du coup il avait suffi de deux-trois verres… Ils se sont récriés… Oh, mais c’était pas grave… C’était rien… Ca arrivait à tout le monde… Mais vous aviez pas été trop dures avec moi au moins après ?… Parce que qu’est-ce que vous aviez l’air sévère là toutes les deux sur le banc !… Ca devait vraiment pas être rose pour moi tous les jours … Ah ça, non !… Non !… Ils pouvaient le dire… Mais je faisais avec… Il fallait bien… J’avais pas trop le choix… « - Et est-ce que ?… - Est-ce que quoi ?… - Ben… Elles avaient l’air de vouloir… D’attendre qu’on soit partis pour… - Oh non, elles l’ont pas fait… Oh, non !… Tu parles… Manquerait plus que ça… »… Mais ils allaient pas me lâcher comme ça… Vous l’aviez peut-être pas fait… Peut-être pas là… Mais il y avait sûrement des fois où c’était arrivé… Hein ?… Obligé… A la façon dont vous m’en menaciez toutes les deux… J’ai nié… Oh, allez !... Je pouvais bien le dire... Continué à nier… Mais non !… Non !… Pas du tout… Ils ont insisté… Mais si !… Si !… Ils le savaient n’importe comment… Ils le savaient ?!… Comment ça ils le savaient ?!… Ben oui, ils le savaient… Oui… Parce qu’ils avaient vu… Parce qu’ils étaient pas vraiment partis en réalité… Ils avaient fait claquer les portières, ronfler le moteur, démarré en trombe, mais ils s’étaient arrêtés dans la petite rue derrière… Ils étaient revenus… A pied… Et ils avaient tout vu, planqués derrière la haie de troënes… Hein ?… Mais c’était dégueulasse !… Ils étaient dégueulasses… Pourquoi ils avaient fait ça ?… Ben parce que… Parce que… Et pourquoi ils me le disaient maintenant ?… Pour me mettre la honte ?… Pour m’humilier ?… C’était ça ?… Ils croyaient que c’était pas assez dur comme ça pour moi de recevoir encore des fessées à mon âge ?… Si !… Non !… Ils avaient pas voulu… Ils voulaient pas… J’ai fondu en larmes… Fait semblant… Je me suis effondrée sur le canapé… Ils m’ont entourée… Ont passé leurs bras autour de mes épaules… Là… C’était tout… C’était fini… Il y avait pas de quoi se mettre dans des états pareils enfin !… Si, il y avait de quoi, si !… Parce qu’ils savaient pas ce que c’était, eux, que de recevoir des fessées à tout bout de champ pour un oui pour un non… Et maintenant eux en plus qui… Ils m’ont consolée… Ils m’ont caressé les joues… le cou… les épaules… Plus bas… Tout tendres… Tout calins… Avec du désir paillettes dans leurs yeux… Je me suis abandonnée… Complètement… Ils ont posé leurs joues sur mes fesses… Comment c’était rouge !… Vous m’aviez pas loupée, ah non, alors !… Leurs lèvres… Ils les ont piquetées de baisers… Agacées avec leurs dents… Alors forcément c’est arrivé… Tous les deux… En même temps… De chaque côté… Comment c’était bon !… Et pour eux aussi… On va se revoir du coup… Ce soir… Et alors je voulais vous demander… Vous pourriez pas juste avant… Mais alors juste avant… Au moment de partir…
- T’en mettre une ?… Tu l’as amplement méritée, avoue !…
- Oh oui, je l’ai méritée, oui !… Et pas qu’un peu…

lundi 21 février 2011

Belle-soeur, beau-frère ( 7 )





Le surlendemain de notre retour de Vacances ils sont repartis tous les deux…
- On n’a pas le choix… Faut battre le fer tant qu’il est chaud… Oh, mais c’est l’affaire d’une semaine… Tout au plus…
Elle a tourné longtemps autour du pot, a fini par se décider au moment où elle bouclait son dernier sac…
- Par contre on voulait te demander… si tu pouvais de temps en temps aller jeter un coup d’œil vite fait sur Zélia… Sous un prétexte quelconque… Sans t’attarder bien sûr… Juste histoire qu’elle sache qu’elle peut pas faire ce qu’elle veut… Que tu risques de lui tomber dessus à tout moment… Ca rassurerait Paul… Qui se pose quand même pas mal de questions à son sujet… Et qui a sans doute d’excellentes raisons pour se les poser… Voilà ce que c’est aussi de vouloir à toute force épouser une jeunette…

- Voilà ce que c’est surtout de pas être en état de baiser… Bon, mais tu vas faire quoi, toi ?… Je vais vraiment t’avoir par les pieds tous les jours ?…
- Hein ?… Ben je…
- Tu t’es mis dans la tête que vu qu’ils étaient partis t’allais y avoir droit tous les soirs… Non ?… C’est pas ça ?… Avoue… Et si j’avais envie de me taper un petit extra, moi alors ?… Je pourrais pas ?… Oh, mais fais pas cette tête-là !… C’est pas d’actualité… Mais on sait jamais… On ne doit jamais dire « Fontaine, je ne boirai pas de ton eau… »… Ca te ferait quoi si je le faisais ?… Tu réagirais comment ?…
- Je te hacherais menu…
- Oui, oh, tu parles !… T’en aurais strictement rien à foutre…
- De toute façon tu fais bien ce que tu veux… Tu ne m’appartiens pas…
- Ca, c’est sûr… Je ne t’appartiens pas… Je n’appartiens à personne… Je n’appartiendrai jamais à personne… Quoique…
- Quoique ?…
- Non… Rien… C’est trop tôt… Je te dirai un jour… Plus tard… En attendant en douce que j’avais raison…
- Raison ?… A quel sujet raison ?…
- Qu’on courrait quasiment aucun risque tous les deux… La preuve : c’est même eux qui nous poussent dans les bras l’un de l’autre… Bon, mais allez, on s’offre un petit resto ?… Comme quand on était en Vacances…

- On donne carrément dans le grand luxe…
- C’est juste pour ce soir…
- Oui, oh, tu parles !… Là-bas aussi on disait ça… Et c’était tous les jours… T’as pas peur qu’elle s’en rende compte à force Emilie ?… Qu’elle te demande où ça passe tout ce fric ?…
- Je suis encore en droit de disposer comme je veux de l’argent que je gagne, non ?… Manquerait plus que ça !…
- C’est toi qui vois… Remarque… Je dis ça, mais moi c’est pareil : Paul, il aurait pas intérêt à vouloir mettre le nez dans mes comptes… Il serait drôlement reçu… Même si parfois il vaudrait quand même mieux qu’il y ait quelqu’un qui supervise tout ça… Parce que je sais pas si ça te fait ça à toi aussi, mais des fois je vais économiser pendant des semaines et des semaines, voire des mois, sou à sou, me priver pour m’acheter un gros truc bien précis et puis, au dernier moment, je dilapide tout en conneries… Et quand je dis en conneries, c’est vraiment en conneries… Après je m’en veux… Tu peux pas savoir comme je m’en veux… Mais c’est trop tard… Le mal est fait… J’avais une copine, quand j’étais en fac, tu sais pas ce qu’elle avait trouvé comme solution ?… Eh ben elle avait demandé à un type, un ancien voisin, beaucoup plus vieux qu’elle, de les lui tenir ses comptes… Et de rien lui laisser passer…
- C’est-à-dire ?…
- C’est-à-dire… Ca va pas te choquer ?… C’est-à-dire que quand elle avait vraiment exagéré il lui mettait une fessée… Et il faisait pas semblant… Elle m’a montré un jour… Il te lui avait mis le derrière dans un état !… Mais elle, elle était contente… Elle disait qu’elle en avait besoin de ça… Que ça lui évitait de se mettre en danger… Pour le fric et pour plein d’autres trucs…Au début, franchement, je trouvais ça bizarre, vraiment très très bizarre… Et puis à force de l’entendre expliquer…
- Tu as fini par te sentir tentée…
- J’ai pas dit ça…
- Non, mais…
- Bon, allez, tu viens ?… On y va ?…

Quelques dizaines de pas sur le trottoir…
- Et si on allait là ?…
- Maintenant ?… Tout de suite ?…
- Tout de suite, oui… J’ai trop envie… Pas toi ?…
- Si !… Si !… Mais on n’a pas nos affaires… Rien…
- Mais ça déteint, ma parole !… Tu vas pas te mettre à faire le Dorlandier, toi aussi !… Allez, viens !…
Elle s’est résolument emparée de la clé que le réceptionniste nous a tendue, nous a enfermés dans la chambre à double tour…
- Là… Et maintenant je te viole… Tu te laisses faire… Je m’occupe de tout…

jeudi 17 février 2011

Sur le banc ( 3 )





- Qu’est-ce qu’il y a ?… T’en fais une tête !…
- Il y a que… je suis nulle… Complètement nulle…
- Me dis pas que t’as recommencé ?!… Et sans capote !…
- Ben si !… Si !…
- C’est pas vrai !… Non, mais c’est pas vrai… T’es complètement irresponsable… T’as quoi dans la cervelle ?… Hein ?!… T’as quoi ?… Ca t’a pas servi de leçon la dernière fois?... Non… Il a fallu que tu coures y remettre le nez…
- Je peux pas m’empêcher…
- C’est des histoires, ça !… On peut toujours quand on veut…
- Pas moi !… Il suffit qu’il me regarde d’une certaine façon le type… Avec plein d’étoiles suppliantes dans les yeux et je craque… Tout ce qu’il veut il peut avoir…
- Et c’était qui cet heureux gagnant ?…
- Je lui ai pas demandé…
- On aura tout vu… Non, mais cette fois on aura tout vu… Bon, mais tu sais ce qui t’attend ?…
- Oui…
- Si au moins j’étais sûre que ça serve à quelque chose !… Parce qu’il va se passer quoi ?… Tu vas me faire toutes les promesses du monde… Ca !… Pour ça tu es très forte… Et puis tu vas te tenir à carreau trois jours et à la première occasion… Non… Non… Je baisse les bras… Colle-lui en une, toi, Myriam… Si le cœur t’en dit… Si tu penses que ça peut servir à quelque chose… Peut-être qu’avec toi ce sera plus efficace, mais moi… je renonce…

- Elle s’est pas fait prier… Comment elle a sauté sur l’occasion !… Elle attendait que ça, oui !…
- Probable en effet…
- En tout cas elle tape plus fort que vous… Ca, c’est sûr !… Et pas qu’un peu…
- Tu as aimé ?…
- Oh, ben oui, oui !… Surtout que comment ça l’excitait !… Ca se sentait… La seule chose… J’aurais cru qu’elle grondait plus que ça… Qu’elle faisait beaucoup plus honte… Elle a presque pas parlé finalement…
- Et ça t’a manqué ?…
- Un peu, oui… Parce que je m’étais imaginé… Qu’elle serait méchante… Qu’elle arrêterait pas de se moquer… De faire des tas de réflexions sur mon derrière… Tout ça…
- C’était la première fois… Peut-être qu’une autre fois…
- Oui, mais vous lui dites rien, hein !… Faut pas qu’elle sache… Faut qu’elle continue à croire… Ce serait plus marrant du tout si elle était au courant qu’on est de mèche toutes les deux et que c’est pas des vraies punitions que je ramasse…

- Dis-moi… C’était bien inventé tout à l’heure ?…
- Quoi ?… L’histoire du mec ?… Non, mais attendez !… Vous vous figurez quand même pas que je vais aller baiser sans capote avec quelqu’un que je connais ni d’Eve ni d’Adam !… Je suis pas folle quand même…
- Donc… tu as menti…
- Ben oui, oui… Mais c’est parce que…
- Oui, mais tu as menti… Tu sais bien que j’ai horreur de ça… Tu vas être punie… Allez !… Viens là !…

- Comment c’est pire une deuxième juste par-dessus !… Surtout quand la première elle a piqué que le diable…
- Tu regrettes ?…
- Oh non !… Non… Mais ce que vous avez tapé plus fort que d’habitude !… C’est à cause d’elle ?… Parce que vous l’avez vu faire ?… Et que vous voulez pas être en reste ?…
- Pas spécialement, non…
- De toute façon plus ça va et plus j’aime que ça fasse mal… Je sais pas pourquoi… Le seul problème c’est qu’après…
- Après ?…
- Ben j’ai vachement envie… Et comme je vous disais l’autre jour on peut pas après… Attendez !… De quoi on a l’air ?… Vous imaginez la tête du type ?… « - Qui c’est qui t’a fait ça ?… On te flanque encore des fessées à ton âge ?… »… Non, mais de quoi j’aurais l’air ?… Il se foutrait carrément de ma gueule, oui !… Et il aurait rien de plus pressé que de courir raconter ça à tous ses copains…
- A moins que ça le mette dans tous ses états… Et que t’aies droit à un véritable feu d’artifice…
- Oui, mais faudrait être sûre… C’est drôlement risqué… Si ça le prend d’aller chanter ça partout sur les toits… J’aurai bonne mine, moi !…
- Il peut aussi tenir à garder ça pour lui… Histoire de rester le seul à en profiter… De pas donner envie à d’autres de se mettre sur les rangs…
- En attendant comment ça doit faire honte qu’un homme il s’en rende compte !… Déjà une femme !… Mais alors un homme…
- Ca te déplairait tant que ça ?…
- Ben non… Non… Evidemment non…
- Peut-être qu’il voudrait t’en rajouter une couche ?…
- Oui… Ben alors là !… Mourir ça me fait…

lundi 14 février 2011

Belle-soeur, beau-frère ( 6 )





- Il descend pas ?…
- Non… Il préfère rester là-haut, sur le balcon, à trier ses photos… Tant qu’il aura pas fini…
Zélia s’est levée…
- Oui, ben moi, je vais nager… Jusqu’à la petite île là-bas… Vous venez ?…
Emilie s’est retournée sur le ventre…
- Pas moi, non !… J’ai trop la flemme… Mais allez-y, tous les deux, allez-y !…

On a pris pied, dégoulinants. Elle a quitté son maillot, suivi mon regard…
- Ils peuvent pas nous voir… On est trop loin… Il leur faudrait des jumelles… Et ils n’en ont pas... Ni l’un ni l’autre…
On s’est allongés côte à côte…
- On est quand même mieux là…
- Ca, ça se discute même pas…
- Tu sais l’impression que ça me donne depuis qu’ils sont arrivés ?… C’est qu’ils forment un vrai couple tous les deux… Qu’ils l’ont toujours formé… Et je sais pas trop où elle peut être notre place à nous là-dedans… A toi comme à moi…
Elle a fait couler un long filet de sable entre ses doigts…
- Ca faisait six jours qu’on les avait pas vus… Je voudrais pas être indiscrète, mais… tu y as eu droit hier soir ?…
- Non… Non… Et toi ?…
- Oh, moi je me faisais pas beaucoup d’illusions… Faut que je me fasse une raison… Si j’y ai à nouveau droit un jour ce sera un véritable miracle…

On est restés enlacés…
- Eh ben dis donc !…
- Oui… Oui… J’avais sacrément du retard à rattraper… Comment c’était bon !… Moins pour toi, non ?…
- Si !… Oh, si !…
- Je crois pas… Pas vraiment… Tu t’es trop préoccupé de mon plaisir à moi… Pas assez du tien… C’est bien aussi, tu sais, quand un homme tu le sens se perdre… Quand il y a plus rien d’autre qui compte pour lui que sa jouissance… Et que c’est de toi qu’il la veut… De toi et de personne d’autre… Tu peux pas savoir comment ça m’excite, moi, ça aussi !… Quand vous pensez plus qu’à vous…

- Et alors ?… C’était pas mieux ?… Avoue !…
Je lui ai répondu d’un baiser. D’un autre. D’une multitude de baisers…
- Ca t’a pas choqué ?…
- Quoi donc ?…
- Tout ce que j’ai crié… Parce que quand c’est comme ça je peux pas m’empêcher de hurler des tas de trucs cochons… Tout ce qui me passe par la tête… Je sais pas pourquoi d’ailleurs… J’ai jamais su… Ca a toujours été comme ça… Bon… Mais faudrait peut-être qu’on retourne là-bas, non ?…

Emilie n’était plus sur la plage ni Paul sur le perron… Ils étaient installés tous les deux, côte à côte sur le canapé de la petite salle de séjour, les yeux rivés à l’écran de l’ordinateur…
- Ah, c’est vous ?!… Figurez-vous que la mayonnaise est en train de prendre… Et pas qu’un peu !… Philippe a prospecté et il a fait du sacré bon boulot… Ca a pas perdu de temps… Trois familles d’inscrites déjà… Et pas des petites… Dont une qui veut venir très rapidement… Ce qui signifie que début septembre on est bons pour retourner tout mettre en ordre là-bas… Et les accueillir…

- Tu dors ?…
- Non…
- Excuse-moi pour cet après-midi… Je te l’ai laissée sur les bras… Déjà que tu te l’es coltinée tout seul depuis le début des vacances… Mais c’était au-dessus de mes forces de nager avec elle jusque là-bas… Je la supporte pas… C’est physique… Rien que de la voir… J’avais pourtant pris de bonnes résolutions… J’allais me montrer aimable, faire bonne figure sinon pour elle du moins pour Paul… Je peux pas… C’est pas la peine, je peux pas… Vaut mieux que je l’ignore… Le plus possible… Ca tournerait mal… Et très vite… Très très vite… Malheureusement j’ai bien peur qu’elle n’ait pas fini de nous en faire voir… Parce que si le projet prend corps avec Philippe – et il va prendre corps : on a tous les atouts en mains – s’il prend corps elle va forcément vouloir s’en mêler…
- Je crois pas… Elle a un métier auquel elle semble tenir…
- Oui, oh, alors ça !… Du moment qu’il va s’agir de faire la Madame et de pérorer tant et plus tu peux être tranquille qu’elle va jouer des pieds et des mains pour être aux premières loges… Seulement ça c’est le meilleur moyen de tout foutre par terre… D’abord parce qu’elle sera imbuvable avec la clientèle – c’est couru d’avance – et ensuite parce que ni Philippe ni moi on ne la supportera… Et si Paul ne veut pas comprendre ça…
- Vous en avez parlé ?…
- Oui… Il y a des moments où il donne l’impression d’être prêt à l’entendre et d’autres où il se braque complètement…
- Ce qui est légitime… C’est quand même sa femme…
- Ce qui ne devrait pas l’empêcher malgré tout d’admettre qu’elle a de gros problèmes relationnels avec la plupart des gens… Non, mais il y a autre chose… Dont il ne parle qu’à mots couverts… Mais je le connais depuis le temps… Non… Ce qu’il y a c’est qu’il répugne à la laisser seule… Parce que… Ben parce que, si j’ai bien compris, elle aurait tendance à courir… En plus !… Ici, c’était pas pareil… Tu étais là… Avec elle… Ca l’a obligée à une certaine réserve… Elle pouvait pas se permettre de faire n’importe quoi… Mais une fois remontée là-haut, livrée à elle-même… Alors à mon avis s’il veut l’emmener c’est surtout pour l’avoir à l’œil…

jeudi 10 février 2011

Escobarines: Sur le banc ( 2 )





- Violine ?!… Viens ici !… Viens voir là… T’entends ce que je te dis ?…
- Qu’est-ce qu’il y a ?…
- Tu peux pas venir quand je t’appelle ?…
- Ben je suis venue puisque je suis là…
- Commence pas à faire ta raisonneuse, veux-tu !… Tu vas où comme ça ?… Qu’est-ce que c’est que cette tenue ?…
- Quelle tenue ?…
- C’est carnaval ?… Et regarde-moi !… Regarde-moi, j’ai dit !… Il y a bal masqué, c’est ça ?… Et tu t’es déguisée en pot de peinture ?…
- Si je peux même pas me maquiller à mon âge…
- Tu peux te maquiller, oui, mais raisonnablement… T’as vu à quoi tu ressembles ?…
- Toutes mes copines…
- Je me fiche pas mal de tes copines… Tu vas me faire le plaisir d’aller te débarbouiller…
- Oui, ben alors ça sûrement pas… Je suis majeure… Et je fais ce que je veux…
- C’est ce qu’on va voir !…
- C’est tout vu…
- Pour commencer tu vas me faire le plaisir de changer de ton… Et ensuite je te rappelle que je t’héberge… Et qu’on a passé un accord toutes les deux…
- Oui, mais…
- Oui, mais quoi ?…
- Non… Rien…
- Tu m’agaces… Tu mériterais que je t’en colle une, tiens !… A force de chercher…
- Mais je cherche pas…
- Ah non ?… Qu’est-ce que t’es en train de faire ?…
- Toujours vous m’accusez… J’en ai marre à force…
- Bon, cette fois ça suffit !… Tu vas y avoir droit… Approche !…
- Oh non, s’il vous plaît !… Non… Pas maintenant !… Pas devant elle… Tout à l’heure… Je ferai tout ce que vous voudrez tout à l’heure…
- C’est devant elle que tu te montres insupportable… C’est pas devant elle ?…
- Si !…
- Eh bien alors c’est devant elle que tu vas être punie… Allez, approche, j’ai dit !…

- On peut pas dire qu’elle soit très courageuse cette grande fille !… Ce qu’elle a pu crier !… Et pleurer… Et supplier… Et comment elle s’est débattue !… Et comment elle s’est tortillée…
- Ah ça !… Tant qu’il s’agit de n’en faire qu’à sa tête elle est très forte… Mais dès qu’on élève un peu le ton… il y a plus personne… Bon, mais va vite te débarbouiller, toi !… Et passer une tenue décente…

- Ah, ben voilà !… Voilà!… A la bonne heure… C’est quand même mieux comme ça, non, tu trouves pas ?…
- Si !…
- Tu vois que quand tu veux te montrer raisonnable tu peux… Pourquoi il faut toujours que tu fasses ta mauvaise tête comme ça ?…
- Je sais pas… C’est plus fort que moi… Je peux pas m’empêcher…
- Si seulement tu consentais à faire un minimum d’efforts… Bon, mais allez !… Va vite !… File !… Tes amis vont t’attendre… Et rentre pas trop tard…

- Qu’est-ce qu’elle a dit quand j’ai été partie ?… Elle a dit quelque chose ?…
- Que tu l’avais pas volé… Et qu’à ma place elle t’en mettrait bien plus souvent et des beaucoup plus appuyées…
- Ca, c’est sûr qu’elle le ferait !… Vous avez vu ses mains ?… Comment elles sont sèches !… Et maigres !… Comment ça doit faire mal !… Surtout que je suis sûre qu’elle tape fort…
- Il y a un moyen simple de vérifier…
- Oh non !…
- Non ?…
- Enfin si !… Si… Mais faudrait qu’elle ait une raison…
- Tu crois que ce serait si difficile que ça à trouver ?…
- Non… Sûrement pas, non… Elle aimerait ça en plus !… Vous avez vu l’air qu’elle avait pendant que vous me la mettiez ?… Comment ça lui faisait plaisir !… Elle s’en cachait même pas… Cet espèce de petit sourire… Et ce qu’elle a pu me le reluquer le derrière… C’aurait été que d’elle on y serait encore… Elle revient quand ?…
- Quand on voudra… Quand je lui dirai… Je crois pas qu’elle se fasse trop prier…
- Ca !…
- Bon, mais et toi ?… Ta soirée ?…Ca a été ?…
- Oui, oh…
- Ca a pas l’air…
- Si… Si… Mais ce qu’il y a… c’est que je me suis fait draguer… Et pas qu’un peu…
- C’est si désagréable que ça ?…
- Non… Bien sûr que non… La seule chose, c’est que j’ai pas pu donner suite…
- Ben pourquoi ?…
- Il va forcément se rendre compte dans quel état j’ai le derrière le type… Ca craint… Et du coup… tintin… Mais quand même… quand même… je préfère quand même la fessée…

mardi 8 février 2011

Petit rappel...

Les dessins qui illustrent "Belle-soeur, beau-frère" sont des oeuvres d'Emma amicalement réalisées pour la circonstance:

http://emmapage.canalblog.com/


Quant à ceux qui inspirent, depuis plus d'un an, les "Escobarines" , ils sont de Jean-Philippe ( Escobar )

http://jpcworldcolorgalery.hautetfort.com/

lundi 7 février 2011

Belle-soeur, beau-frère ( 5 )





- Ca devient une véritable tradition notre petite promenade digestive sur la jetée en sortant du resto… J’aime bien… Je pourrais plus m’en passer, je crois…
- Dis-moi… Je voudrais te demander… Tu parlais sérieusement tout à l’heure ?…
- Je t’ai choqué ?…
- Oh non, non, pas du tout… Seulement un peu surpris…
- L’un de mes défauts – ou l’une de mes qualités… tout est question de point de vue – c’est d’être très directe… On aime ou on n’aime pas… Et… je voudrais pas en rajouter une couche, mais j’avoue que les quelques jours qu’on a passés ici tous les deux ont été enchanteurs pour moi… Il y a longtemps que je ne m’étais pas sentie aussi bien… Il n’y manquait qu’une chose… Une chose dont je suis privée depuis de trop longs mois… Une chose dont tu es, toi aussi, manifestement trop souvent privé… Une chose dont – j’en suis convaincue – nous aurions tort de continuer à nous priver… Mais tu ne réagis peut-être pas, tu ne raisonnes peut-être pas, tu ne ressens peut-être pas comme moi… Je le comprendrais parfaitement… Dans ce cas tu oublies… Mettons que je n’ai rien dit…
- Mais je n’ai pas du tout envie d’oublier… Je n’ai pas du tout envie que tu n’aies rien dit…
Nos mains se sont cherchées, trouvées… On s’est souri… Et on a cheminé, flanc contre flanc…

Tout au bout, à côté du phare, je l’ai prise contre moi. Nos lèvres se sont effleurées, jointes. Son portable a sonné…
- C’est Paul… Allo… Oui… Oui… Très bien… D’accord… Oui… Non… Non… A tout de suite…
Elle a raccroché…
- Ils arrivent… Dans moins d’une heure ils sont là…
- Hein ?… Mais demain elle m’avait dit… Demain au plus tôt…
- Ils auront changé d’avis…
- On a un pot, mais un pot !…
- En attendant on a intérêt à se dépêcher d’aller mettre un peu d’ordre… Parce que qu’est-ce que je vais pas entendre sinon !…

- Figure-toi… Tu m’écoutes ?… Figure-toi qu’avec Philippe on a eu une idée de génie… De génie, oui, n’ayons pas peur des mots !… Comme quoi ça sert ces petites réunions de famille… En plus d’être très agréable… Il y en a qui ont beau les dénigrer… Je parle pas pour toi évidemment… Oui… Tu sais quoi ?… Je te le donne en mille… Eh bien on va en organiser… pour les autres… Parce que des gens qui souhaiteraient se rencontrer comme nous on le fait il y en a des quantités… Surtout aujourd’hui où tout un chacun a besoin de retrouver ses racines… De se ressourcer aux vraies valeurs… Seulement tout le monde ne dispose pas toujours d’un lieu adéquat… Nous, on l’a… Magnifique… Somptueux… Et inoccupé pratiquement toute l’année…On peut y loger une centaine de personnes au bas mot… Autant en faire profiter autrui… Contre coquette rémunération cela va sans dire… Mais ce n’est pas tout… Parce qu’on va aussi oeuvrer en amont… Il y a des familles éparpillées dont les membres n’ont seulement jamais songé à se recontacter… Mais qui seraient pourtant ravis si cela se faisait… Notre rôle va justement consister à les retrouver – avec Internet ce sera un jeu d’enfant – et à leur donner l’idée et l’opportunité de restaurer les liens distendus… Bon… Mais je te montrerai tout ça… En détail… Pour le moment faudrait peut-être qu’on aille retrouver nos femmes… Elles doivent nous attendre…
Emilie dormait profondément…

Elle dormait encore quand je me suis levé. Zélia et Paul étaient attablés devant l’ordinateur portable…
- Là, c’est Basile… Tu le connais pas Basile… Tu peux pas le connaître… C’est un cousin d’Alice… Eloigné certes, mais un cousin quand même… Si tu regardes l’arbre généalogique il fait partie de la famille, c’est incontestable… Ca se discute même pas… Là, c’est Adrien… Mais si !… Je t’en ai parlé d’Adrien… C’est celui qui était resté coincé toute une matinée dans un ascenseur à Lille il y a deux ans… Et là c’est quand on est montés à Notre-Dame de La Chatâigneraie… C’est toujours aussi émouvant… Même tant d’années après… Jean y a dit la messe… C’était d’une intensité !…

- Eh bien raconte !… Epluche-moi les patates et raconte tant qu’on n’est que tous les deux…
- Raconter… Mais raconter quoi ?
- Eh bien comment ça s’est passé avec elle… Parce que j’imagine que ça a pas dû être rose tous les jours… Qu’elle a démultiplié les caprices comme à son habitude… Elle est imbuvable… Proprement imbuvable… Là-dessus tout le monde est d’accord… Sauf Paul qui la porte tant et plus aux nues… Quand on dit que l’amour rend aveugle !… Le problème, c’est qu’il commence à se rendre compte qu’elle passe mal, très très mal dans la famille et qu’il en souffre… Il ne m’a pratiquement parlé que de ça pendant tout le voyage… Et il m’a fait de la peine… Beaucoup de peine… Je t’assure que c’était poignant par moments de l’entendre… Mais que veux-tu que j’y fasse ?… Mamie est remontée contre elle comme une horloge… Quant aux autres, c’est guère mieux… Faut voir comment ils parlent d’elle… Si seulement elle s’était efforcée, de son côté, d’arrondir un minimum les angles… Mais non… A croire qu’elle prenait un malin plaisir à les monter contre elle… Maintenant la seule chose que nous puissions faire, toi et moi, à notre petit niveau à nous, pendant les quelques jours que nous allons passer avec elle ici, c’est de la supporter… De notre mieux… Et je te demande, quoi qu’il t’en coûte, de faire des efforts, de prendre sur toi, de te montrer aussi aimable que tu pourras… Ce ne sera pas facile, oui, je sais, mais je te le demande… Pas pour elle… Non… Je m’en fiche d’elle… Complètement… Non… Pour lui… Pour Paul…

jeudi 3 février 2011

Escobarines: Sur le banc





- Faut savoir ce que tu veux !… Soi-disant que t’en crevais d’envie…
- Ben oui !… Si !… Mais…
- Mais quoi ?…
- C’est qui la femme ?…
- Je te l’ai déjà dit vingt fois !… Une connaissance à moi…
- Elle va pas aller le chanter sur les toits au moins ?… Tout le pays va pas être au courant ?…
- Mais non !… Faut toujours que t’aillles te mettre des idées invraisemblables en tête…

- C’est Violine… La petite étudiante dont je t’ai parlé…
- Ah oui… Celle qui redouble toutes ses années de fac…
- Voilà, oui…
- Et qui ramène des tas de bonshommes dans son lit… Qu’en a jamais assez… Je vois pas ce que t’es allée t’encombrer d’une gamine pareille chez toi !… Elle doit être invivable…
- Faut reconnaître qu’elle a son caractère… Et qu’elle est comme tous les jeunes… Désordonnée et tête en l’air… Si je n’y mettais pas bon ordre…
- Toi ?… Laisse-moi rire !… Je te vois bien dans le rôle, tiens !…
- Oh si, si !… Je peux te dire que je la lui fais ranger sa chambre… Et qu’elle a intérêt à passer à table à l’heure…
- Ben voyons !…
- Tu peux lui demander… Demande-lui… Hein, Violine ?!…
- Oui…
- Elle a l’air convaincue que ça fait peur…
- Non, mais si, c’est vrai, hein !… Et elle a pas intérêt à me désobéir ou à me répondre de travers… Parce qu’alors là elle a affaire à moi…
- C’est ça, oui !… Te connaissant comme je te connais tu lui fais les gros yeux… Tu lui dis que c’est pas bien… Qu’elle est pas gentille… Et elle recommence le lendemain…
- Oui… Eh bien détrompe-toi !… Pas plus tard qu’hier soir alors qu’elle me saoulait avec sa musique…
- Faut dire qu’ils sont d’un agaçant avec ça…
- Je lui avais demandé de baisser… Dix fois… Vingt fois… Pas moyen… Elle est plus têtue qu’une mule…
- Et alors ?… Qu’est-ce t’as fait ?… Tu lui as mis une fessée ?…
- Tu crois pas si bien dire…
- Et tu comptes me faire gober ça ?…
- Violine… Dis-lui, toi !… C’est pas vrai ?… Eh bien réponds !… Qu’est-ce que t’attends ?… Non ?… Bon… Eh bien viens ici alors !… Ah, commence pas !… Laisse-toi faire !… Laisse-toi faire, j’ai dit !… Là !… Et ça c’est pas une fessée peut-être ?…
- Oh, si !… Et une belle !… Elle est pas près de recommencer…
- Oui, oh, alors ça !… On voit que tu la connais pas… Elle est entêtée que le diable avec sa musique…
- J’aurais jamais cru ça de toi…
- Ben tu sais, il arrive un moment quand il n’y a pas d’autre solution… Reste comme ça, toi !… Bouge pas !… Tu comprends ce que je te dis ?… Eh bien alors !… Elle est dure, tu sais !… Elle m’en fait voir… Oh, mais je finirai par en venir à bout… Surtout qu’elle a pas mauvais fond, tout compte fait… Et qu’elle sait très bien, en son for intérieur, que c’est dans son intérêt que j’agis… D’ailleurs les résultats commencent à se faire sentir… C’est pas encore ça, mais ça s’améliore tout doucement… Elle est beaucoup plus calme… Beaucoup plus posée… Quant aux notes à la fac c’est spectaculaire… Bon… Mais en parlant de fac justement il serait plus que temps… Allez !… Dépêche-toi de te reculotter…

- Je suis contente… Oh oui, je suis contente… C’était juste comme j’avais envie… Avec exactement les mots qui me font quelque chose… On aurait dit que vous les lisiez à l’intérieur de moi… Et puis sa tête à la bonne femme en plus !… Le genre de tête que je peux pas voir… Elle est mauvaise ça se sent… Elle se réjouit du malheur des gens… Une vraie peste… C’est pas une vraie peste ?… Si, hein ?…
- Un petit peu…
- Pas seulement qu’un peu, je suis sûre… Vous savez ce qu’il faudrait un jour ?… C’est que vous m’en mettiez une devant elle… Une sévère… Interminable… J’aimerais trop ça… Voir sa tête… La regarder me regarder… Entendre ce qu’elle dirait… Oh, oui, ça me plairait trop… On pourrait pas ?…
- Oh, s’il y a que ça pour te faire plaisir…
- Quand ?…
- N’importe… Quand tu voudras…
- Demain alors… On pourra bien demain, hein ?…